C’est à Emile Durkheim que nous devons l’application de la notion d’organique au champ sociétal. Faisant référence à Charles Darwin, il montre, dans son ouvrage fondateur « De la division du travail social », que la mise en contact d’individus semblables (ayant des modes de vie identiques) conduit à une concurrence destructrice, à une « lutte pour la vie (de plus en plus) ardente ».
Il oppose ainsi à la solidarité « mécanique » - fondée sur les similitudes – une solidarité organique – impliquant des différences – et permettant, par la différenciation et l’interdépendance des activités, la cohésion sociale.
Une diversité d’initiatives émergentes signe aujourd’hui le passage du monde ancien au monde nouveau annoncé en 1921 par Pitirim Alexandrovitch Sorokin sous le terme de Grande Transition. Se caractérisant par des « processus d’individuation » et, simultanément, par l’apparition de nouvelles formes d’écosystèmes (réseaux, communautés, clusters, nouvelles formes d’urbanité…) et de nouvelles manières d’organiser les interactions entre les « composantes du système » …
Ces émergences semblent pouvoir se comprendre et s’interpréter au moyen de cette notion de « société organique » … De même qu’elle interroge les modèles du monde ancien, les représentations et les pratiques sociales qui les supportent, elle préfigure ceux du monde nouveau.
Les membres de la Société Française de Prospective
Introduction de Michel SALOFF COSTE
Animation : Christine AFRIAT / Fabienne GOUX-BAUDIMENT
Dans la société organique, les hiérarchies sociales (classes, élites, organigrammes) assurent le bon fonctionnement des organes comme de l’ensemble de l’organisme, tandis que la complémentarité et l’interdépendance des individus sont le ciment de la cohésion sociale[1].
Ces liens, qui répondent aujourd’hui à un besoin de reliance, sont de plus en plus nombreux et variés grâce à internet. Cette mise en réseau de la société entraîne des phénomènes de stigmergie ―quand une action en stimule une autre― et d’intelligence en essaim : deux phénomènes observables dans la nature (termitière, fourmilières), mais qui montrent rapidement leurs limites.
L’humain au sein de la société organique est-il capable de dépasser ces limites pour créer une nouvelle intelligence collective, fondée sur la symbiose ?
Cependant, dans une telle société organique, aujourd’hui multiculturelle, quelle coexistence est-elle possible ?
Mots-clés : symbiotique, Lien, société unie, stigmergie, reliance, intelligence en essaim, coexistence.