2012/09/20

2012 09 20 LE LIT A BALDAQUIN UN EXTRAIT DU ROMAN "INTEGRALE MACHINE" DE MICHEL SALOFF COSTE




Photo de Michel Saloff Coste colorié à la gouache 25.09.2010


UN CHAPITRE DU ROMAN "INTEGRAL MACHINE" de Michel Saloff Coste:

LE LIT A BALDAQUIN

Julia était toute heureuse de retrouver Paris

Chaque fois elle était contente dans cette ville. C'était un choix de lieu de vie délibérée pour elle, l'endroit parfait pour s'épanouir et pour vaquer à ses occupations favorites, aussi bien professionnelles que personnelles.


Toute contente, elle s'étirait dans le grand lit à baldaquin qu'avait installé Olivier depuis sa demande en mariage, comme pour marquer une nouvelle étape dans leur relation. Le lit constituait comme une petite pièce à l'intérieur de la grande pièce. Elle avait découvert qu'elle aimait rester dans le lit à baldaquin lorsque les rideaux défaits du lit créaient une alcôve close sur elle même. Alors le lit devenait une sorte de bateau imaginaire qui pouvait s'envoler dans n'importe quel pays. Elle imaginait que, une fois arrivée sur place, elle sortait de son alcôve pour se retrouver dans une chambre exotique indienne, turque, égyptienne, chinoise….. Ainsi, tous les matins par la magie de l'alcôve elle se retrouvait ailleurs.

Ce rituel imaginaire prit de plus en plus d'importance et lorsqu'elle en avait le temps, elle restait à imaginer un envol, un lieu de destination et ensuite les aventures qui lui arrivaient une fois sortie de son lit et de sa chambre dans la contré étrange dans laquelle elle s'était projetée. Parfois dans ses rêves éveillées, elle rencontrait un homme ou une femme, qui déventait le support d'uneintrigue amoureuse.

Vers cette période là, Julia devint de plus en plus rêveuse et ce travail imaginaire prit une place considérable dans sa vie. Ce qui fut encore plus étonnant ce que après avoir visitée ainsi en imagination beaucoup d'endroits de la planète ou elle souhaitait aller, elle se mit à utiliser son lit pour explorer d'autres planètes. C'était comme si son imagination avait été déchainée par le lit à baldaquin, qui agissait alors sur son esprit comme un psychotrope puissant. Sur certains planètes, qu'elle s'était mise à explorer elle devait rester caché afin de ne pas troubler les populations autochtones, étranges et restées à de niveaux de civilisation peu évolués. Sur d'autres planètes au contraire elle était accueillie comme une princesse par des peuples plus évolués qui lui faisait découvrir les secrets de leur civilisation et les mystères de l'évolution future de l'humanité. Bientôt elle découvrit que la vision linéaire qu'elle avait de l'évolution, était factice. Elle découvrit à mesure qu'elle explorait des planètes de plus en plus étranges, que la multitude des espèces extraterrestres ne se développaient pas du tout obligatoirement sur le même vecteur d'évolution. En fait il existait une infinité de manière d'évoluer, ce qui faisait qu'il fallait toujours se méfier de l'apparence archaïque d'une civilisation extraterrestre, car cet archaïsme pouvait justement cacher une évolution extrême dans des domaines encore inconnus sur terre.
Un jour qu'elle méditait dans son lit à baldaquin sur ce paradoxe, elle fut emportée dans son voyage sur une planète ou tout était bleu. Il y avait des bleus de toutes les nuances et de toutes les "couleurs". Mais la tonalité dominante restait le bleu profond. Un bleu profond, un bleu infini qui scintillait et donnait une consistance étonnante à chaque objet. Sur cette planète à dominante bleue, tous les objets étaient doux et moelleux, mais aussi sensible aux émotions. Il y avait, comme un lien psychique entre le mondeintérieur et le monde extérieur. Le premier jour ou Julia atterrît sur cette planète, elle fut émerveillée, car son lit à baldaquin s'était posé dans un vaste champ à fleurs, qui rassemblait les espèces les plus diverses.

Quand Julia sortit de son lit et posa son pied nu sur la terre de cette nouvelle plante le champ entier de fleurs frémît. Toutes les corolles se tournèrent vers elle dans une interrogation muette. A mesure qu'elle marchait dans le champ à fleur, elle s'aperçût que chacune des fleurs à son passage était saisit d'une émotion spécifique et qu'elle restituait cette émotion en bougeant et en changeant de couleur de manière parfois imperceptible et fugace, mais aussi parfois de manière évidente et durable. Julia avait l'impression de marcher au milieu d'un champ de pensées fugaces et les émotions de ce millier de fleurs la remplissaient d'échos étranges.
Bientôt elle vit apparaître un couple. C'était deux êtres aux formes humaines, mais comme allongés dans le sens de la hauteur et eux aussi étaient bleus. Quand Julia s'approchât d'eux ils commencèrent à vibrer, comme si le seul fait de se rapprocher de Julia créait chez eux une transformation profonde, une sorte de bouillonnement de cellules, qui modifiait les tonalités de la couleur de leurs corps nus. Julia se mit à parler et chaque fois, qu'elle disait un mot, il venait s'inscrire comme un dessin complexe sur le corps des extraterrestres.
Le champ de fleurs lui même s'emblait aussi ressentir les mots à sa manière. Julia ressentît que les extraterrestres lui parlaient. Mais leur bouche ne bougeait pas. Julia sentit le message se former directement dans son cerveau dans un langage limpide, qu'elle comprenait parfaitement avec une forme d'intimité encore plus forte que sa langue natale. Les extraterrestres lui parlaient dans un langage tellement intime en lui disant des choses tellement important pour elle, tellement belles, qu'elle se mit à pleurer et à rire en même temps. Les deux formes bleus s'approchèrent d'elle et la prirent dans leur bras avec tellement d'amour et de compassion que Julia eut le sentiment pour la première fois de sa vie d'être enfin comprise. Elle n'avait plus aucune envie de revenir sur terre. Chacune des fleurs qui l'entouraient s'imprimait dans son cœur, comme si elle était porteuse d'un message secret, d'un langage unique et d'un instant infini.
Son rêve éveillé devint à cet instant très complexe, car chaque plante devint un tunnel de conscience l'emmenant dans un monde spécifique. Elle a eu l'impression de se démultiplier à l'infinie et sa conscience se fracturât en une multitude de parcelles expérimentant des émotions et des manières d'être au monde extraordinairement diversifiées. Le temps avait cessé d'exister et sa conscience s'était transformée brusquement en une infinité d'instant éternel.

Brusquement elle passa ses mains sur son visage et s'arracha à l'hypnose du sentiment d'éternité en se dressant sur son lit. Elle sauta du lit à baldaquin pour aller prendre une douche froide.


--

Envoyé par nextedition dans MICHEL SALOFF COSTE GALLERY le 9/20/2012 01:24:00 AM 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire